Kéfir, c’est koi ?

Difficile de parler des kéfirs sans évoquer la fermentation. Et souvent, la fermentation reste accrochée aux images de décomposition, de moisissures, de risque sanitaire... Les bactéries, au sens large, qui colonisent les différents supports comestibles, pour ne parler que de cela, sont pourtant des sources de vie.

 

Sans bactéries, pas de digestion, pas de transformation, pas d’assimilation et bien d’autres fonctions qu’elles accomplissent dans l’ombre.

Ces actions biologiques ont permis depuis longtemps la conservation et l’amélioration des qualités gustatives des aliments d’origine animale ou végétale : produits laitiers (yaourts, fromages…), salaisons, notre traditionnelle baguette, des légumes comme le soja, la choucroute, les olives… sans oublier les boissons alcoolisées (vin, bières…) ou non alcoolisées (thé, cacao, fruits…).

Il y a plusieurs types de fermentations. Elles peuvent être spontanées (micro-organismes naturellement présents dans l’air ou sur les aliments de base) ou inoculées (par introduction d’un ou plusieurs ferments par la « main humaine »). Ces développements sont également fortement liés aux conditions du milieu : température, présence ou absence d’oxygènes, milieu aqueux, salin... Selon ces atmosphères et les micro-organismes présents qui s’y plaisent, nous obtenons des fermentations alcoolique, lactique, acétique... ou mixtes.

 

Alors, les kéfirs dans tout ça ?

Ce sont des boissons issues de la fermentation du lait (vache, brebis ou chèvre) ou de jus de fruits sucrés, ensemencés à l’aide de « grains de kéfir ». Ces grains de kéfir souvent opaques et agglutinés sous forme de « choux-fleurs » sont formés de caséine (protéine retrouvée dans le lait) et d’un ensemble de micro-organismes amalgamés et vivant en symbiose. Sur un support lacté ou sucré, ces levures et bactéries, par fermentation lactique, donneront des boissons acidulées, légèrement « pétillantes », riches en probiotiques bien évidemment, mais dans lesquels oligoéléments, vitamines du groupe B et certains acides aminés seront plus concentrés et mieux assimilables.

Attention, selon l’environnement et la durée de fermentation, ces boissons peuvent contenir 1 à 2 % d’alcool. Pas assez fermenté, les kéfirs ont tendance à être sucrés, car les bactéries n'ont pas eu le temps de transformer tout le sucre ; et au-delà de 3 jours, ils deviennent plus acides (acide lactique ++) et pétillent davantage (gaz carbonique dégagé ++). À chacun de trouver le goût qui lui convient, mais sans les garder trop longtemps. Adaptez les récipients à votre consommation, et gardez-les au frigo pour stopper la fermentation.

La plupart des vertus ces élixirs proviennent des bienfaits de ces micro-organismes qu’ils contiennent. On peut en dénombrer plusieurs dizaines d’espèces entre les grains de kéfir que l’on peut se procurer en pharmacie (marque Yalacta®), celles des magasins spécialisés de diététique ou celles qui en ont recueillis auprès de proches provenant de précédentes semences. Les principales font partie des familles de lactobacillus, lactococcus, bifidobacterium, saccharomyces...

Par leur potentialité enzymatique, ils vont transformer plus facilement le lactose du lait et permettre d’augmenter sa digestibilité. Ainsi, ils sont intéressants chez les personnes n’ayant pas suffisamment de lactases (enzyme qui transforme le lactose du lait en galactose et glucose) et qui souffrent d’intolérances liées aux aliments en contenant.

 

L’évocation du mot probiotique laisse penser à une action positive sur notre flore intestinale, notre microbiote, et donc à un apport bénéfique de bonnes bactéries pour notre système immunitaire. Ce que certaines études, certes de faible envergure, ont pu mettre en avant chez les rongeurs. Ces kéfirs sembleraient également apaiser les douleurs gastriques et améliorer certains dermatoses (allergies, eczémas...), mais peu d’études fiables sont disponibles pour valider ces indications. Néanmoins, l’action sur nos défenses et les sous-produits de ces fermentations ne laissent pas augurer de méfaits notables !

 

Je vous invite par conséquent à tenter cette expérience en famille, à préparer vos premiers kéfirs de lait ou de fruits en 24 ou 48 heures, à profiter de leurs saveurs caractéristiques. Vous serez fier de partager vos premiers grains de kéfir avec votre voisin ou vos proches. Le kéfir de fruit a même été nommé le « champagne du Caucase » pour sa délicieuse saveur, son côté pétillant... de quoi vouloir encore plus le partager !

 

Pascal Guerit

Docteur en Pharmacie

DU Diététique et Nutrition

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